PAROLE DONNÉE

Arnaud Donckele

Trois étoiles depuis 2013, 19/20 au Gault & Millau depuis 2016, la Vague d’Or, sublime table de l’Hôtel Cheval Blanc de Saint-Tropez, a hissé haut la voile de la gastronomie dans le sud de la France.  À la tête de ce navire méditerranéen, Arnaud Donckele qui désarme par son humilité non feinte et qui charme par sa philosophie de la cuisine. Quant à ses plats, ils nous laissent émus. D’ici quelques mois, il prendra les rênes de la table gastronomique de l’Hôtel Cheval Blanc Paris, un nouveau défi. Rencontre.

PAROLE DONNÉE

Arnaud Donckele

Trois étoiles depuis 2013, 19/20 au Gault & Millau depuis 2016, la Vague d’Or, sublime table de l’Hôtel Cheval Blanc de Saint-Tropez, a hissé haut la voile de la gastronomie dans le sud de la France.  À la tête de ce navire méditerranéen, Arnaud Donckele qui désarme par son humilité non feinte et qui charme par sa philosophie de la cuisine. Quant à ses plats, ils nous laissent émus. D’ici quelques mois, il prendra les rênes de la table gastronomique de l’Hôtel Cheval Blanc Paris, un nouveau défi. Rencontre.

« Je voulais trouver le meilleur moment pour votre venue, pour avoir du temps à vous consacrer. » Arnaud Donckele est ainsi. Il veut constamment faire plaisir aux gens, que ce soient les clients, les journalistes, sa brigade ou encore les habitués de la Vague d’Or avec qui il entretient des liens très privilégiés. « Le couple d’habitués que je viens de saluer à l’instant dîne dans 2 à 3 tables étoilés par semaine. Ils me connaissent depuis mes 26 ans et m’ont énormément aidé. J’ai des discussions franches avec eux et j’aime avoir leur ressenti sur mes créations. Quand, l’année dernière, ils ont pleuré après avoir goûté mon turbot, ce fut un grand moment. Je sais qu’ils vont déguster en avant-première tous les plats que je suis en train de construire pour Paris. »

Ce jeune chef vit, respire, pense cuisine. Chaque seconde est dédiée à sa passion. Passion qu’il exerce en tant que chef depuis 2005 à la Résidence de la Pinède, rebaptisé cette année Cheval Blanc après avoir été racheté en 2016 par LVMH. En 2013, une troisième étoile est venue briller sur les cuisines de la Vague d’Or, table méditerranéenne d’exception. Et d’ici quelques mois, c’est officiel, Arnaud Donckele prendra les rênes du restaurant.

En attendant l’ouverture de ce lieu exclusif, la saison bat son plein à Saint- Tropez. Goûter la cuisine d’Arnaud Donckele est un moment privilégié dans une vie de gourmet.

D’où vient ce sentiment d’avoir découvert une table à nulle autre pareille ? De la précision des assiettes, des cuissons, des assaisonnements ? De la complicité hors norme qui lie le chef à Thierry Di Tullio, directeur du restaurant et magnifique conteur de plats qui sait mettre les mots justes sur les sensations à venir ? D’une équipe de salle quasi exclusivement féminine à la posture parfaitement dosée, ce juste milieu du ni trop, ni trop peu ? De ces plats sensuels qui laissent un souvenir impérissable en bouche ? Sûrement un peu tout cela à la fois.

En cuisine, l’ambiance est là aussi totalement différente d’ailleurs. Une agitation impressionnante. Les serveurs marchent au pas de course, tout va vite, extrêmement vite, même si les gestes restent précis.

« Les nouveaux arrivants dans la brigade sont souvent déstabilisés par ce rythme. C’est vrai qu’il y a une intensité rare ici, mais j’aime cette frénésie, j’essaie de faire comprendre à ma brigade que leur don de soi aura un impact positif sur l’expérience vécue par les clients. Je pense que les gens en ont marre des choses pompeuses, ils ont envie d’affection, de sentir notre sensibilité. »

Et en plein de coup de feu, Arnaud Donckele donne l’exemple : il est littéralement partout, jamais on n’aura vu un chef tout superviser à ce point-là, il goûte une sauce, veille sur les dressages et prend même le temps d’expliquer à un commis, en plein milieu du service, ce qu’il attend exactement de lui.

« Je suis comme ça, je goûte constamment, le pain, les sorbets, je fais toutes les sauces. Ainsi, on évite les contrariétés. Notre engagement doit transpercer les murs de la cuisine et arriver sur la table. »

Comment définiriez-vous votre cuisine ?

L’intemporalité est notre fil conducteur. À la Vague d’Or, nous ne voulons surtout pas suivre les modes… Je ne mets à la carte que des recettes pour lesquelles nous avons le sentiment d’être arrivés à un aboutissement.

Et si je cherche à créer des plats contemporains, actuels, je veux qu’ils soient avant tout intemporels. Ils sont toujours accompagnés d’une histoire, d’une philosophie.

Le processus de création est donc assez lent pour vous…

Oui, nous prenons notre temps en faisant et refaisant inlassablement les recettes jusqu’à atteindre un résultat qui nous plaît vraiment. Nous ne sommes pas pressés, et il nous faut parfois 2 à 3 ans avant qu’un plat arrive sur la carte. Concrètement, comment se passe la création ? Elle se fait en 4 temps.

Le premier acte est instinctif. Comme un premier test grandeur nature : nous servons une nouvelle recette à nos clients habitués. Ces derniers séjournent longtemps à l’hôtel, nous avons donc une affection particulière pour eux et avons envie de leur offrir des plats qui ne sont pas sur la carte. Ces clients, dotés d’une très grande culture gastronomique, ont la gentillesse d’être honnêtes envers moi.

En fonction de leurs retours, nous ajustons la recette avant de la servir à d’autres clients, que je connais bien aussi et en qui j’ai entière confiance. Je sais qu’ils n’hésitent pas à me dire les choses comme ils les pensent.

Nous profitons ensuite de la phase hivernale pour sourcer les bons produits, rencontrer les producteurs, afin de garantir une régularité dans la qualité. Vient enfin la phase de la conception finale de l’assiette, avec le choix du contenant, du dressage.

Justement, vous accordez un soin tout particulier aux arts de la table…

Selon moi, le contenu est primordial dans l’accord parfait du plat. Je calcule souvent le poids des produits, pour ensuite définir le diamètre d’une assiette, sa forme… Certains choix peuvent être beaux à l’oeil mais perdre en efficacité en bouche. Moi, je cherche le volume et l’harmonie.

Nous servons, par exemple, la sériole dans une cuillère. Si nous avions choisi une assiette plate, nous n’aurions pas forcément obtenu la même amplitude de gourmandise.