MYAM!
HUGO BOURNY
« Tout l’enjeu a été de créer une cuisine personnelle, de me libérer de mes mentors. »
TEXTE : PAULINE DE WAELE | PHOTO : PHILIPPE VAURÈS SANTAMARIA
Hugo Bourny n’a pas grandi avec l’idée de devenir cuisinier. La cuisine n’était ni une vocation ni un héritage. À 17 ans, poussé par un besoin d’indépendance, il quitte le foyer familial et cherche simplement un métier. Il découvre la restauration par hasard — et c’est un choc. Le rythme, l’intensité, les gestes, les produits : tout est nouveau, tout le dépasse. Il parle d’une « claque », au sens propre. De celle qui réveille et qui transforme. C’est auprès de Johan Leclerre, Meilleur Ouvrier de France qu’il apprend ce que représentent le travail, la rigueur, le respect du produit et du goût. Il s’engouffre dans cette brèche avec une intensité nouvelle, presque vitale. Là, il trouve un but, une direction, du sens. Ce qui n’était au départ qu’une porte de sortie devient un chemin de vie. La suite se construit dans les grandes maisons : Arnaud Donckele, Anne-Sophie Pic, Hélène Darroze. À chaque étape, il affine sa vision, accepte de redescendre dans la hiérarchie pour mieux apprendre. Plutôt que la lumière, il choisit l’exigence. De L’Auberge de la Charme, en Côte-d’Or, à La Vague d’Or à Saint-Tropez, du restaurant Pic à Valence à Marsan à Paris, il explore, affine, se confronte.
© Philippe Vaurès Santamaria
© yam Magazine
Arnaud Donckele lui fait découvrir la puissance émotionnelle de la cuisine ; Anne-Sophie Pic le forme à la complexité aromatique et à la liberté de création ; Hélène Darroze, enfin, l’ancre dans un rapport plus direct et brut au produit.
© Philippe Vaurès Santamaria
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En 2021, il prend la tête du Lucas Carton, institution parisienne au patrimoine Art nouveau. Un lieu chargé d’histoire, longtemps associé à la figure d’Alain Senderens. Il ne s’y installe pas en propriétaire, mais en passager dévoué, humble mais totalement engagé, qui écrit son chapitre sans jamais trahir ceux d’avant. Hugo Bourny ne vient donc pas pour faire oublier ses prédécesseurs, ni pour s’imposer, mais pour trouver une approche juste, entre l’héritage et son époque. Il s’affranchit des cadres sans les renier, modernise sans brutalité, et installe peu à peu une cuisine personnelle, intuitive, construite sur l’écoute. Sa cuisine se distingue par une attention extrême au goût, une place forte laissée au végétal — qu’il cherche à rendre désirable, gourmand, même lorsqu’il est clivant — et une volonté de dialogue constant avec le client. Chaque plat est conçu à plusieurs voix, testé avec les équipes, validé par l’expérience de la salle. Et toujours, il y a cette idée d’une cuisine vivante, qui s’ajuste, s’adapte, se transmet. Loin de la performance ou du prestige, Hugo Bourny poursuit un autre cap : celui d’un chef à l’écoute, en quête d’équilibre, d’humilité et de justesse.
Vous y retrouverez également ses 8 recettes
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